Prévoir la qualité de l’air permet d’anticiper les mesures de réduction des émissions polluantes.
De nombreuses villes à travers le monde (Pékin, Oulan-Bator, Bombay, New Delhi, Lagos, México, Paris, …) connaissent régulièrement des pics de pollution atmosphérique. La pollution de l’air est caractérisée par la concentration d’ozone au sol. Les habitants y vivent parfois presque toute l’année sous une épaisse brume qui ne leur permet pas de voir au-delà d’une centaine de mètres. De fait, ils sont contraints de limiter, parfois très drastiquement, leurs sorties en se couvrant la bouche d’un mouchoir ou en mettant un masque afin d’éviter les effets nocifs de l’air qu’ils respirent.
Il est donc important de connaître et suivre la qualité de l’air extérieur dans sa région afin d’adapter son comportement. En France, le site Prev’Air, la plateforme de prévision de la qualité de l’air en France fournit des données et des cartes de prévisions comparables à celles de la météo. En cas de pic et d’épisode de pollution, les autorités peuvent déclencher par anticipation des mesures de réduction des émissions polluantes.
Comment donc est élaborée la prévision de la qualité de l’air ?
Comment est modélisée la qualité de l’air ?
Avant de prévoir un phénomène quelconque en utilisant des méthodes numériques et quantitatives, il est très important de le modéliser. Ainsi, l’Institut National de l’Environnement Industriel et des Risques nous apprend que « la modélisation de la qualité de l’air repose sur des outils numériques qui simulent les processus chimiques et physiques responsables de l’évolution des concentrations des polluants dans l’air. Ces modèles sont alimentés en entrée par les données et variables telles que :
- Les émissions de polluants issues de plusieurs secteurs d’activité (trafic routier, activités industrielles et agricoles, chauffage résidentiel, transport maritime …),
- Les conditions météorologiques qui influent sur la dispersion des polluants et aussi sur l’intensité des processus chimiques
- Les conditions aux limites qui apportent une information sur les contributions de pollution d’origine lointaine ».
Plus de détail sur la méthodologie de prévision présentée sur le site de l’INERIS
En quoi consiste la prévision de la qualité de l’air ?
À partir de mesures météorologiques, telles que la vitesse du vent et la température, il est possible de prévoir si l’ozone au sol sera à un niveau suffisamment élevé dans les jours à venir pour déclencher une alerte publique à la pollution de l’air, comme on peut le voir sur les panneaux d’affichage des routes et autoroutes, surtout autour des grandes villes comme Paris, Lyon, Bordeaux et autres villes. La prévision de la qualité de l’air est un processus visant à prédire, avec des intervalles de confiance acceptables, les concentrations de polluants atmosphériques sur une échéance de très court terme (un à quelques jours). On l’applique généralement aux polluants réglementés, tels que l’ozone, le dioxyde d’azote et les particules PM10 et PM2.5, pour anticiper l’arrivée des situations critiques lors desquelles les concentrations risquent de dépasser les valeurs réglementaires.
Les prévisions s’appuient sur des modèles de qualités de l’air dont les sorties peuvent être optimisées avec des traitements complémentaires (correction statistique) qui font notamment intervenir les observations des journées précédentes afin d’améliorer les capacités des modèles pour la détection des épisodes de pollution.
Par exemple, en utilisant un ensemble de données décrivant les observations météorologiques sur un historique assez long (3 à 5 ans) dans une région donnée sur les niveaux d’ozone, on entraine un modèle d’apprentissage automatique (Machine Learning) (voir nos formations en Machine Learning et nos articles) à identifier la structure des données et les diverses tendances observées sur l’historique. Il sera capable donc de prédire quelle serait la tendance de la pollution durant les jours à venir.
Les méthodes de prévision de la pollution atmosphérique peuvent être divisées en trois catégories : les méthodes de prévision statistique, les méthodes d’intelligence artificielle, notamment l’apprentissage automatique (Machine Learning), et les méthodes de prévision numérique. De nouvelles méthodes et modèles dits « hybrides » ont été développés et qui ont permis d’améliorer la précision des prévisions. Cette classification n’est pas, à proprement parler, spécifique à ce domaine. Une étude détaillée « Air Pollution Forecasts: An Overview » présente une synthèse des modèles de prévision dans ce domaine.
Un exemple de modèle de prévision : le modèle CHIMERE
Le site de l’INERIS présente un exemple de modèle de prévision CHIMERE. C’est un modèle de chimie-transport développé et mis en œuvre par l’unité de modélisation atmosphérique et cartographie environnementale de l’INERIS en collaboration avec le CNRS.
« C’est un modèle déterministe. A l’inverse des modèles statistiques, il n’est pas calibré sur des observations mais repose sur les équations de physique et de chimie de l’atmosphère qui régissent le transport et la transformation des polluants. Les données d’entrée qu’il requiert sont les flux d’émissions induits principalement par les activités humaines, et aussi les champs météorologiques qui influent sur l’accumulation des polluants.
Il s’agit d’un modèle dit « régional » développé pour simuler la qualité de l’air sur des domaines s’étendant de quelques dizaines (agglomération) à quelques milliers de kilomètres (continent). Mais le modèle a aussi été déployé dans le cadre d’une preuve de concept sur l’ensemble de l’hémisphère nord. Pour cela, un travail important a été réalisé pour modifier les projections géographiques, prendre en compte la spécificité de l’utilisation des sols et du cycle de la végétation à l’échelle mondiale et adapter des inventaires d’émissions à l’échelle du globe. Une avancée rendue possible grâce aux ressources de calcul du Centre de calcul recherche et technologie (CCRT) et qui a abouti à la production de cartographies de pollution de l’air haute résolution sur tout l’hémisphère Nord : particules fines, ozones, dioxyde d’azote, panaches de poussières désertiques ».
Plus de détails sur le modèle CHIMERE sur le site de l’INERIS qui présente aussi une vidéo de 5 minutes sur la modélisation de la qualité de l’air.
En conclusion, l’ampleur de la pollution de l’air, surtout dans les grandes métropoles a incité les pouvoirs publics, les organismes de régulation et les villes à soutenir les recherches dans le domaines de la prévision pour anticiper les pics de pollution et adapter les alertes indispensables pour protéger au mieux la santé des personnes et surtout celles qui sont les plus vulnérables comme les enfants, les personnes âgées et celles souffrants de problèmes de santé.
Au niveau des méthodes et modèles de prévision, l’apport de la science de données, du big data et de l’intelligence artificielle (Deep Learning et Machine Learning) est indéniable dans l’amélioration de la précision des prévisions des pics de pollution.