Vision « Top Down » contre vision « Bottom Up »?

La demande de produits à profil intermittent peut représenter jusqu'à 50% de la production de certaines entreprises

La demande de certains produits peut être intermittente, c’est-à-dire qu’elle présente des périodes sans vente suivie de brèves périodes de vente. Un tel schéma de demande rend la prévision plus difficile car il n’y a pas de ventes régulières ou continues. 

Le modèle de demande intermittente de Croston n’est pas une technique largement connue ou utilisée, mais il peut être extrêmement utile. Il est généralement utilisé pour modéliser des données dans lesquelles un nombre important de périodes ont une demande nulle mais les commandes non nulles peuvent être substantielles. Ceci est caractéristique d’un article lent qui reçoit l’ordre de réapprovisionner un inventaire en aval. Les prévisions sont sans tendance et non saisonnières.

Un exemple

Prenons l’exemple d’une usine qui fabrique diverses pièces détachées pour les moteurs d’avions (voir graphique ci-dessous). L’usure des pièces d’un moteur d’avion obéit à un cycle de vie et d’obsolescence plutôt qu’à une saisonnalité ou un  trend. Dans ce cas, la demande d’une référence donnée peut présenter un profil intermittent, avec des valeurs nulles certains mois et des valeurs positives en d’autres mois.

L’utilisation de méthodes classiques telles que la méthode du lissage exponentiel ou la méthode de Box & Jenkins s’avère inefficace car ces méthodes nécessitent un historique consistent et continu, sans valeurs absentes ou nulles.

La spécification du modèle de demande intermittente dépendra du profil de la demande, car il existe différentes approches pour aborder le problème des données de demande intermittente.

La prévision avec le modèle de Croston  

Dans un tel cas, le modèle de Croston, du nom de son concepteur J.D. Croston, peut s’avérer une bonne alternative pour produire une prévision d’une demande intermittente. L’idée de l’auteur de cette méthodologie pourrait se résumer en trois étapes simples :

– Évaluer le niveau de demande moyen lorsqu’il y a une occurrence de demande.

– Evaluer le temps moyen entre deux occurrences de demande.

– Prévoir la demande en tant que niveau de demande (lorsqu’il y a un événement) multiplié par la probabilité d’avoir un événement.

Estimation du modèle de Croston

Pour l’estimation, on peut procéder avec cette approche à deux étapes :

  1. Estimation de la fréquence de la demande : Il s’agit de prévoir les moments où la demande se produira (périodes actives) en utilisant une approche de prévision classique telle que la moyenne mobile ou une exponentielle pondérée. Cela permet de capturer les moments où la demande est susceptible de se produire.
  2. Estimation de la taille de la demande : Une fois les périodes actives identifiées, le modèle estime les niveaux de demande réelle en utilisant une méthode similaire à celle de l’étape précédente.

Pour simplifier, le modèle de Croston s’écrira comme suit :

  1. Estimation de la fréquence de la demande (périodes actives) :
  • On calcule la moyenne mobile pour les intervalles entre les périodes actives (interdemande).
  • Soit F la fréquence de demande (1/F représente le nombre moyen de périodes entre deux demandes actives).

          F = Nombre total d’intervalles entre les périodes actives /Nombre total de périodes actives

  1. Estimation de la taille de la demande (niveau de demande réelle) :

L’estimation de la taille de la demande (niveau de demande réelle) dans le modèle de Croston se fait en utilisant une méthode de moyenne mobile. Une fois que l’on a identifié les périodes où la demande est active (périodes avec des demandes observées) lors de la première étape du modèle (estimation de la fréquence de la demande), on peut procéder à l’estimation de la taille de la demande (D) :

– On calcule la somme des demandes actives (D_actif) : On additionne toutes les demandes observées pendant les périodes actives.

– On calcule le nombre total de périodes actives (N_actif) : On compte le nombre de périodes où la demande est active (périodes avec des demandes observées).

– On estime la taille de la demande (D) : On divise la somme des demandes actives par le nombre total de périodes actives. Soit :    

          D = Dactif / Nactif

Une fois la fréquence F et la taille de la demande D estimées, il faudra utiliser ces valeurs pour effectuer des prévisions pour les périodes futures.

Le modèle de Croston est assez simple dans sa formulation, mais il constitue une alternative qui peut aider à élaborer une prévision acceptable pour l’estimation d’une demande intermittente. Des développements récents permettent d’affiner cette méthode tels que présentés dans  « A New Variant of Croston’s Method » et Forecasting Intermittent Demand with the Croston Model et qui sont susceptibles d’apporter des améliorations dans certains cas. Par ailleurs, quelques logiciels de prévision incluent bien la méthode de Croston, notamment le logiciel Forecast Pro.

Il est important aussi de noter que de nouvelles approches pour prévoir les séries chronologiques de demande intermittente ont émergé ces dernières années comme les modèles basés sur l’apprentissage automatique (Machine Learning) qui peuvent fournir de meilleures prévisions dans certains cas.

Conclusion

Pour prévoir une demande intermittente, il est important de tester quelques modèles adaptés au profil de données correspondant tels que le modèle de Croston et ses variantes, ainsi que certains modèles d’apprentissage automatique.